Si ce quartier résidentiel et très chic de South Beach dénombre les plus belles villas de Miami, celle-ci jouit d’un attribut que l’on ne peut retrouver chez ses voisines... À savoir une architecture typiquement hispanique sublimée par la patine du temps, une structure agencée autour d’un patio traditionnel où colonnades et voilages immaculés racontent une histoire d’un autre temps. Cette époque, c’est celle où le président Franklin D. Roosevelt y rendait visite à son fils, propriétaire de la demeure. C’est celle des garden-parties où les flûtes en cristal s’échangeaient autour de la piscine accolée à un ponton en bois. « Nous nous sommes demandé ce qu’était Miami aujourd’hui, car c’est justement ce que nous voulions éviter », amorce Fabrizio Casiraghi, qui a su capter l’âme de cette villa dont les 700 mètres carrés exhalent le charme de la vieille Europe.
Nous sommes à contre-courant des maisons en verre aux lignes contemporaines jalonnant la ville, que l’architecte estime « ne pas être ancrées dans l’ADN de Miami. Nous avons voulu redonner de la couleur, accentuer les zones d’ombre et jouer avec le passé », poursuit-il, expliquant les us et coutumes de l’époque. Point de climatisation dans les années 1950, mais de multiples lucarnes pour inviter la brise à l’intérieur, et des arches sous lesquelles dîner au frais. Là aussi, Fabrizio Casiraghi s’est amusé, peignant les poutres d’origine de tonalités orange et vertes « pour apporter encore davantage de fantaisie à cet extérieur ». Autour du patio, un jardin luxuriant se déploie, entre une végétation.abondante et une fontaine en forme de poisson, dessinée à la demande du propriétaire féru de pêche, et qui résonne comme un hommage au film Mon oncle, de Jacques Tati (1958).
Une passion commune pour la Sécession viennoise
À l’intérieur, l’esthétique européenne s’infiltre entre les murs, vogue d’un objet des années 1950 à une pièce de la Sécession viennoise, Fabrizio Casiraghi et le propriétaire partageant la même passion pour cette période et pour le style autrichien des années 1930 – en témoignent les précédents projets de l’architecte d’intérieur.
Une enfilade avec des arches à la symétrie parfaite relie le salon et la salle à manger au bureau de madame, élégamment verni d’un bois foncé en all-over, que Fabrizio Casiraghi aime utiliser d’un appartement à un autre. « Nous avons chiné la totalité du mobilier, du service dînatoire à l’ensemble de la vaisselle en passant par les œuvres d’art et le mobilier », poursuit l’architecte, nous expliquant comment la villa Santo Sospir, décorée par Jean Cocteau, a inspiré le décor de la salle à manger, la tapisserie murale faisant résonner les réminiscences d’un sud de la France solaire, à la frontière de la Riviera italienne.
Teintée d’un esprit japonisant, monacal et dépouillé, la chambre se révèle être le fantasme d’une cabane en bambou au bord de la mer. Sol en coco tressé, revêtement mural en paille et tapis persan donnent la réplique à une tête de lit ciselée en forme de vagues, un moyen de briser les lignes droites qui régissent la pièce, tout en faisant écho aux remous et à la houle de Miami, les pieds presque dans l’eau.