Pour ce nouveau projet parisien, le décorateur a eu carte blanche. S’il a récemment livré l’hôtel Le Mas Candille sur la Côte d’Azur, le nouvel écrin du restaurant Pur’ du Park Hyatt Paris-Vendôme ou encore le restaurant Gigi à Dubaï et s’il planche actuellement sur l’hôtel La Minerva pour L’Orient Express à Rome, Hugo Toro s’est beaucoup investi en parallèle sur ce projet destiné à un couple avec enfants : « Ils sont venus me chercher pour refaire entièrement cet hôtel particulier de 1911 qui avait été abandonné pendant quinze ans et, n’étant pas habité, se trouvait très abîmé. On y sentait tout de même une certaine âme. Le couple m’a alors demandé de construire une nouvelle histoire, de créer quelque chose de chaleureux et de familial avec une vraie identité ».
À la tête de son agence depuis 2020, ce touche-à-tout prolifique réalise ici son projet résidentiel le plus important. De grosses reprises structurelles ont été nécessaires afin de créer de nouvelles circulations au sein des sept niveaux. La plupart des éléments historiques ont été gardés comme le garde-corps de l’escalier ou les boiseries, soigneusement restaurées. Ce qui intéressait les propriétaires, c’était de conserver cette relation entre passé, présent et futur, d’avoir un lieu ancré dans le contexte parisien, mais avec une touche contemporaine. « L’idée était de mêler les textures, les époques et de faire dialoguer une boiserie ancienne avec des techniques de dorure et de patine, de le réaliser avec un twist comme de l’allier avec de l’aluminium qui est très présent, de dessiner un maximum sur mesure et d’associer des pièces vintage, précise le trentenaire. Ce que j’aime dans ce projet c’est qu’il me permet d’explorer aussi bien mon côté artiste, architecte, architecte d’intérieur que designer. »
Hugo Toro a en effet dessiné sur mesure une grande partie du mobilier mais aussi des luminaires, des tapis. Il a fallu s’adapter aux volumes hors normes, travailler sur une certaine verticalité, en témoigne l’escalier monumental à l’entrée qu’il a souhaité habiller d’un lustre en chrome et verre de Murano tout aussi monumental de sept mètres de hauteur. Omniprésent, le vintage apporte un côté vivant et atemporel au projet, de nombreuses pièces historiques ont été trouvées lors d’enchères, tel le bar brésilien en bois sculpté qui donne du caractère au salon, ou encore au marché aux Puces. On note aussi tout un travail autour de la lumière, de la couleur et des textures, d’un mix de matières brutes et de matériaux sophistiqués. Si la salle de bains parentale se démarque par un all-over d’onyx vert, la chambre attenante offre une douceur feutrée avec son lit surélevé et ses murs recouverts de tissu tendu, et l’on peut observer des poignées en forme de cornes de gazelle sur les portes des placards : « L’invitation au voyage est toujours très présente dans mon travail. Il m’importait de créer un patchwork nomade de références qui soit chaleureux et s’adapte à cette famille. »
Sa patte personnelle apparaît également dans la direction artistique des œuvres et notamment ses propres peintures qui s’inscrivent ici comme une évidence même si elles ont été réalisées indépendamment. Ainsi sa toile Écho de la mangrove semble toujours avoir trôné dans le salon et lui confère une touche d’exotisme bienvenue. L’exotisme est aussi de mise avec le plafond en bois laqué, les daybeds en rotin et les multiples cactées entourant la piscine intérieure et, au dernier étage, le jardin d’hiver avec sa terrasse : « Ces deux petites pépites en haut et en bas permettent hiver comme été d’utiliser le lieu et d’avoir cette invitation au voyage », explique le créateur.
Côté architecture, de nombreux éléments ont été ajoutés comme les encadrements en aluminium, les arches et la cheminée en céramique bombée vert d’eau dans le salon. Le résultat est éclectique avec une stratification de styles temporels – du classicisme parisien au brutalisme en passant par les années 1970. Chaque espace a néanmoins sa propre identité, créant une surprise visuelle, que ce soit les salons d’apparat, les salons de réception, les six chambres et leurs salles de bains, les bureaux, le home cinéma, la salle de sport ou la piscine. L’hôtel particulier dispose également d’un petit jardin aménagé par le paysagiste Guillaume Demont. Pour chacune de ses réalisations, Hugo Toro crée un univers global à forte dimension narrative empruntant à l’univers du cinéma. Son travail architectural se pense comme un scénario, avec une mise en scène soignée des espaces et un souci extrême du détail : « C’est un projet très dessiné que j’ai voulu très chaleureux, insiste Hugo Toro qui a ici absolument tout maîtrisé et c’est assez rare pour le souligner. J’aime être là du début à la fin, mes projets sont des moments de vie. »
L’exposition de peintures de Hugo Toro sera visible à Paris, à l’Institut culturel du Mexique, au 119, rue Vieille-du-Temple, du 4 février au 22 mars 2025.