Paris se dote d'un magnifique musée Art nouveau
« J’aime l’architecture, et si je l’aime, c’est parce qu’elle comprend, dans son essence, dans sa formule, dans sa fonction, et dans toutes ses manifestations “tous les autres arts”, sans exception », déclarait Hector Guimard de son vivant. Emblématiques du paysage parisien, ses entrées dans certaines stations de métro, comme celle de la Porte Dauphine, sont ses joyaux Art nouveau les plus célèbres. Citons aussi la synagogue de la rue Pavée, dans le Marais, l'hôtel Guimard ou encore l'hôtel Mezzara, dans le XVIe arrondissement. Ce dernier, fermé jusqu'à présent, abrite une incroyable collection de décors et mobiliers Art nouveau. Mais il se prépare ouvrir ses portes au public prochainement, pour partager ce précieux patrimoine.
L'Art nouveau à travers Paris
Si Paris est moins connue pour ses chefs-d'œuvre Art nouveau que Barcelone (avec Gaudi) et Bruxelles (avec Victor Horta), la capitale française abrite quelques pépites méconnues. Mais il suffit parfois de s'attarder sur un immeuble pour en déceler les splendeurs. L'hôtel Mezzara, classé aux monuments historiques, en fait partie. Situé à quelques pas de la Maison de la Radio et de l'avenue Mozart, dans le XVIe arrondissement, il appartient aux nombreux (et confidentiels) monuments signés par Hector Guimard. Après de longues années dans l'ombre, il sera dévoilé au public fin 2027-début 2028 en devenant le musée Hector Guimard.
Hector Guimard, le Gaudi français
Mais qui était Hector Guimard ? Certainement moins illustre auprès du grand public qu'Alphonse Mucha, son contemporain tchèque auteur de vitraux et affiches iconiques du mouvement Art nouveau, l'architecte français gagne à être connu. Né à Lyon en 1867 et disparu à New York en 1942, il a imposé le « Style Guimard » à Paris, principalement, ne se réclamant jamais du mouvement Art nouveau, mais en adoptant tous les contours à partir des années 1890. Sa première réalisation caractéristique, le Castel Béranger (1898), s'inspira largement de l'esthétique de Victor Horta, que Guimard avait rencontré à Bruxelles quelques années avant sa construction. Logé lui aussi dans le même périmètre du XVIe arrondissement, cet immeuble présente toutes les caractéristiques de l'Art nouveau, de ses plafonds à ses sols en mosaïque, ses vitraux, ses papiers-peints… jusqu'au mobilier.
Par la suite, l'architecte construisit plusieurs remarquables villas autour de Paris : le Modern Castel à Garches, le Castel Henriette à Sèvres, la Bluette à Hermanville-sur-Mer… Mandaté pour réaliser les entrées des bouches de métro, aujourd'hui renommées par le monde, il fut pourtant critiqué par ses contemporains pour son usage de l'art industriel. Il conçut ensuite plusieurs immeubles, à l'instar de son propre hôtel particulier dans le XVIe arrondissement, avant de s'exiler à New York à l'extinction de l'Art nouveau au profit de l'avénement de l'Art déco dans les années 1930.
L'hôtel Mezzara, joyau caché
Le 23 juin, l'association Le Cercle Guimard, qui réunit ses fervents passionnés, a remporté l'appel d'offre pour la restauration de l'hôtel Mezzara, achevé par Hector Guimard en 1910. Niché parmi les immeubles haussmanniens de la rue Jean-de-la-Fontaine, ce bâtiment de 750 mètres carrés recèle mille et une merveilles de l'architecte : mobilier intact, escalier en ferronnerie, spectaculaire vitrail, fresque de Guimard et de ses amis contemporains, comme Charlotte Chauchet-Guilleré, objets de décoration… Un véritable trésor, jusque là méconnu. Devenu école privée dans les années 1930, puis foyer pour lycéennes des années 1950 à 2015, l'hôtel particulier a été classé l'année suivante grâce au soutien de l'association Le Cercle Guimard.
Le musée Guimard, premier musée Art nouveau de Paris
Avant l'ouverture du musée, une restauration estimée à 6 millions d'euros est prévue dans les prochains mois, pour une durée d'environ deux ans. Elle sera opérée sous l'égide d'experts de l'Art nouveau, d'artisans d'art et d'architectes spécialistes des monuments historiques. Les intérieurs de l'hôtel Mezzara seront enrichis, en outre, de prêts et dons d'institutions et de collectionneurs ; ainsi que d'une expérience en réalité virtuelle pour plonger pleinement les visiteurs dans l'univers de Guimard, en reconstituant virtuellement une somptueuse salle de concerts conçue par ce dernier dans le quartier. « Installé dans des fauteuils originaux et muni d’un casque à réalité virtuelle, le visiteur pourra rentrer dans la salle spectaculaire et assister à quelques minutes d’un concert de musique d’époque », rapporte Connaissance des Arts, après avoir contacté Nicolas Horiot, président de l’association Le Cercle Guimard. À l'horizon 2028, le musée devrait ouvrir ses portes au public pour un ticket d'entrée compris entre 15 et 20 euros. Une réjouissante nouvelle.