Visites privées

À Paris, un appartement dans l'ancien hôtel particulier de François Mansart

Au cœur du Marais, l’architecte Thomas Fournier signe une résidence qui célèbre l’héritage de François Mansart, à travers un projet au charme intemporel.
hôtel particulier paris

Cet hôtel particulier historique à Paris respire l’élégance intemporelle.

À quelques pas de la place des Vosges et du musée Picasso se trouve un charmant hôtel particulier du XVIIe siècle conçu par l’architecte Thomas Fournier, autrefois résidence du célèbre architecte François Mansart. Niché dans l’une des rues les plus enchanteresses du Marais, entouré de jardins luxuriants et de magnifiques bâtiments de la Renaissance, cet appartement parisien raconte une histoire pleine de charme artistique. Les propriétaires actuels, Aurélia et Romain, un couple de trentenaires avec un enfant, ont choisi de l’acheter après des années passées entre Londres et New York. Romain, né au Japon, et Aurélia, originaire de Paris, ont été séduits par le patrimoine culturel de l’appartement, un lien qui résonne avec l’histoire de la famille de Romain, impliquée depuis 170 ans dans la mise en valeur du Clos Lucé, dernière demeure de Léonard de Vinci.

Le grand salon au mobilier raffiné : canapé Istanbul réalisé sur mesure par la designer Léa Zeroil et inspiré du canapé d’enfance de Romain ; table en bois foncé des années 1970 d’Inverno Galerie ; tabouret Cyl de Stanislas de Baudus avec structure en chêne massif et fer martelé patiné, assise recouverte de lin Designs of the Time ; table basse en bois laqué et métal des années 1970 ; chaises vintage en bois foncé ; tableau de Carl Laubin représentant un paysage indien ; tapis Rugvista Handloom avec franges en laine beige.

Giulio Ghirardi

« Les propriétaires souhaitaient rendre à l’appartement son âme historique, en respectant l’héritage de François Mansart, tout en créant un espace confortable pour leur famille. L’appartement, bien que d’une grande valeur historique, avait subi de nombreuses transformations, en particulier dans les années 1970, qui avaient compromis beaucoup de ses éléments d’origine. L’objectif était donc de retrouver l’équilibre et les proportions, en s’inspirant des commandes classiques de Mansart, et d’intégrer une esthétique contemporaine grâce à des matériaux et un mobilier sur mesure », explique Thomas Fournier.

L’architecte Thomas Fournier.

Giulio Ghirardi

Un héritage historique important

Construit par François Mansart en 1642, ce lieu chargé d’histoire fut la résidence et l’atelier du célèbre architecte jusqu’à sa mort en 1666. À l’étage supérieur vivait son arrière-petit-fils, Jules Hardouin-Mansart, futur premier architecte de Louis XIV, qui y fit son apprentissage avant de construire des monuments emblématiques tels que Versailles, les Invalides et la place Vendôme. L’appartement est resté dans la même famille pendant 120 ans, jusqu’à ce qu’il soit acheté au XIXe siècle par le révolutionnaire brésilien Raymundo Teixeira Mendes, qui l’a transformé en « chapelle de l’humanité » en hommage au positivisme d’Auguste Comte. Malheureusement, une rénovation effectuée dans les années 1970 a modifié de nombreux éléments originaux, altérant en partie son charme d’origine.

Détail du salon avec un meuble en bois sur lequel sont posées deux lampes de la Galerie Au Débotté.

Giulio Ghirard

Le projet a donc nécessité une recherche historique minutieuse afin de redonner à ce lieu son allure d’origine. « Avec les clients, nous avons examiné l’inventaire post-mortem de Mansart (1666) pour comprendre la distribution originale des espaces et les détails architecturaux de l’époque. Le défi était de réinterpréter les codes du XVIIe siècle de manière contemporaine, en évitant une simple restauration stylistique. »

Grâce à une recherche minutieuse dans les archives, il a été possible de retrouver le testament de François Mansart et une description détaillée de l’agencement original de l’appartement. « Cette étude a guidé la restauration dans le respect des proportions harmonieuses, de la sobriété architecturale et des principes classiques chers à Mansart. Nous avons voulu redonner à l’appartement son âme historique, effacée par les interventions ultérieures. Beaucoup d’éléments d’origine ayant été perdus, l’approche a été de réinterpréter l’esprit de Mansart plutôt que de le reproduire fidèlement », explique Thomas Fournier.

Le salon lumineux avec ses deux fenêtres.

Giulio Ghirardi

Un équilibre parfait entre mémoire et contemporanéité

Lumineux et empreint de tranquillité, cet appartement de 85 mètres carrés se distingue par ses grands espaces harmonieux, rehaussés par trois grandes ouvertures qui amplifient la perception de la profondeur. Le séjour et la cuisine séparée, avec accès direct à une terrasse, donnent sur les jardins privés de l’hôtel de Savourny (XVIe siècle), offrant un cadre verdoyant et serein. Ici, seul le chant des oiseaux rompt le silence, évoquant les mots de Madame de Sévigné, ancienne habitante de cette rue, qui répétait souvent : « J’ai l’impression de vivre sur une île. » Les deux chambres donnent sur une rue calme, offrant une vue privilégiée sur l’hôtel Carnavalet et l’hôtel Le Peletier de Saint-Fargeau, qui abrite aujourd’hui le musée de l’Histoire de Paris. Un équilibre parfait entre lumière, perspective et histoire, où chaque pièce est une invitation à la contemplation et à la détente.

Un coin du salon avec un meuble mural blanc conçu sur mesure. Canapé Istanbul fabriqué sur mesure par la designer Léa Zeroil ; tapis Rugvista Handloom avec des franges de laine beige ; table basse en bois et métal laqué des années 1970 ; vase stylisé en céramique avec glaçure bleu saphire de Marie Saint Bris ; sur les étagères, céramiques, vases, bols, poires et oiseaux de l’artiste Marie Saint Bris ; et photographie sur le mur Chêne solaire de Carmen Bouyer.

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Le choix de matériaux et de couleurs sobres, au caractère typiquement parisien, confère à ce lieu un charme unique. Le mobilier et les œuvres d’art sont très éclectiques : un mélange de pièces de voyage, de souvenirs de famille et d’œuvres d’artistes appréciés par les propriétaires, comme Carmen Bouyer et Marie Saint Bris. « Le canapé, par exemple, est une réinterprétation du canapé d’enfance de Romain. Chaque élément a été choisi en fonction d’une affinité émotionnelle plutôt que d’un simple critère formel », explique Thomas Fournier.

La chambre d’enfant, avec une table de jeux et une chaise chinoise du XIXe siècle, achetée dans le quartier de Chinatown à New York. Le lit est recouvert d’un tissu de style indien de C&C Milano. Le tableau Les trois grues et le taureau brun est signé Carmen Bouyer.

Giulio Ghirardi

Aujourd’hui, la terrasse est l’un des espaces les plus appréciés : entourée de verdure et loin de l’agitation de la ville, elle évoque une atmosphère intemporelle. Le salon a également une valeur symbolique, avec ses piliers et ses ordres classiques qui rendent hommage à Mansart, où la lumière, la géométrie et l’histoire se conjuguent dans un équilibre parfait. Le parquet en échelle, motif rare et distinctif, rappelle le charme du château de Maisons, l’un des chefs-d’œuvre de Mansart. « Il ne s’agit pas d’une restauration philologique, mais d’une réinterprétation de l’élégance de Mansart dans une tonalité moderne », conclut Thomas Fournier.

Sur le mur de la chambre, un portrait de la propriétaire enfant par l’artiste libanais Bob Elia. Sur la table de chevet, une lampe AKARI 3A de Noguchi. Siège japonais vintage Tansu ; tapis de Codimat.

Giulio Ghirardi

Article initialement publié dans AD Italie.