Quelles sont les origines de l’architecture byzantine ?
Née avec l’Empire romain d’Orient en 395 après J.-C., l’architecture byzantine se développe pleinement entre 527 et 565. Synthèse des héritages romains et grecs, enrichie par des influences orientales et chrétiennes, elle constitue essentiellement la prolongation de l’architecture romaine traditionnelle où de vastes édifices sont consacrés au culte ou aux affaires publiques et peuvent accueillir de grandes foules. Par la suite, surtout au cours de la période où se multiplient les monastères et où les édifices tendent à être utilisés par une clientèle restreinte de fonctionnaires et de dignitaires plutôt que par les foules, les édifices prennent des dimensions plus limitées, en même temps que le plan adopte de manière plus générale la forme d’une croix grecque et que l’attention se porte sur la ou les coupoles ainsi que les clés de voûte.
Comment reconnaître l’architecture byzantine ?
Extérieurs souvent sobres, intérieurs opulents et chargés de symboles : ainsi pourrait-on résumer le style byzantin. Dans ses matériaux et sa structure, il se caractérise par l’utilisation de briques avec des joints de mortier épais, parfois combinées à de la pierre taillée, avec un recouvrement intérieur en marbre ou en mosaïques. Car dans l’architecture byzantine, l’accent est mis sur l’intérieur des édifices, avec une attention portée aux grandes coupoles et aux décors symboliques plutôt qu’à la monumentalité extérieure d’un bâti qui demeure classique. Cela donne des intérieurs riches en mosaïques dorées illustrant des scènes religieuses ou impériales, accompagnées d’icônes et de retables.
Les plans architecturaux en croix grecque – nef centrale croisée par quatre bras– favorisent une organisation centrée tandis que persistent des plans basilicaux à trois nefs issus de l’Antiquité chrétienne primitive. Des coupoles majestueuses, souvent posées sur pendentifs pour transformer un espace carré en dôme circulaire, achèvent de caractériser l’architecture byzantine.
Héritage et postérité de l’architecture byzantine
L’architecture byzantine s’est étendue dans les pays marqués de l’empreinte de l’Empire byzantin comme la Bulgarie, la Serbie, la Russie, l’Arménie et la Géorgie après que Constantin a transféré la capitale de l’empire de Rome vers Constantinople en 330. Plus tard, elle a profondément influencé les écoles d’Europe orientale et la tradition orthodoxe. De même que l’architecture byzantine, née dans l’Orient chrétien, a façonné un style sacré et puissant, ses innovations structurelles (dômes, pendentifs, plans centrés) et son décor intérieur fastueux ont rayonné largement, de Constantinople jusqu’à la France médiévale et moderne.
À l’époque moderne, en France, le néo-byzantinisme illustre le goût du XIXᵉ siècle pour le religieux monumental, mêlant tradition, identité nationale et symbolisme chrétien. Certains édifices modernes en béton tels que l’église du Saint‑Esprit, à Paris, reprennent les formes byzantines de façon dépouillée et fonctionnelle. Dans cette réinterprétation contemporaine du style, le néo‑byzantinisme s’illustre en France dans la basilique du Sacré‑Cœur à Montmartre, l’église Saint‑Augustin et l’Opéra Garnier (style « romano-byzantin ») et, en Tunisie, dans la cathédrale Saint‑Louis de Carthage (byzantino-maure) …
Mais sa construction inaugurale et emblématique de l’architecture byzantine demeure à jamais la basilique Sainte-Sophie à Constantinople (aujourd’hui d’Istanbul), chef-d’œuvre immuable du style byzantin avec son dôme monumental et ses mosaïques iconiques, référence architecturale absolue.
Exemples d’architecture byzantine en Europe
Plan central à coupole enveloppé d’un décor d'éblouissantes mosaïques impériales du VIᵉ siècle : Saint-Vital est un exemple pur de byzantinisme occidental. Achevée en 547 et vieille de près de 1 500 ans, la basilique San Vitale fut construite en même temps que Sainte-Sophie à Constantinople. À l'époque, Ravenne était l'épicentre du monde occidental, lorsque l'Empire byzantin en fit sa capitale. Sous Justinien, Ravenne devint même la jumelle de Constantinople ou « la Constantinople de l'Occident ».
La basilique Saint-Marc de Venise est un chef-d’œuvre de l’architecture byzantine, enrichie d’influences occidentales et orientales, reflet du rôle de Venise comme carrefour commercial et culturel. Édifiée au XIe siècle pour abriter les reliques de saint Marc, elle se distingue par son plan en croix grecque, surmonté de cinq coupoles majestueuses inspirées des églises de Constantinople, notamment Sainte-Sophie. Sa richesse ornementale en fait une œuvre unique : l’extérieur est décoré de marbres polychromes, de sculptures et de mosaïques aux fonds dorés, conférant à l’édifice un éclat unique, quand l’intérieur est entièrement habillé de mosaïques byzantines représentant des scènes bibliques, créant un espace sacré baigné de lumière dorée.
Près d’Athènes, le monastère de Daphni, est un chef-d’œuvre de l’architecture byzantine du XIe siècle. De plan en croix inscrite, il se caractérise par une coupole centrale reposant sur un tambour à seize pans, percé de fenêtres, symbole d’élévation spirituelle. Sa maçonnerie mêle pierre et brique dans un décor sobre mais raffiné. L’intérieur, richement orné de mosaïques à fond d’or, représente des scènes bibliques majeures. Le monastère conserve aussi une enceinte défensive, témoignant de sa fonction monastique et protectrice.
Construite en 537 sous l’empereur byzantin Justinien Ier, la basilique Sainte-Sophie, ou Hagia Sophia, fut d’abord une église chrétienne, puis une mosquée après la conquête ottomane en 1453, un musée en 1935, et de nouveau une mosquée en 2020. Chef-d’œuvre architectural, son immense dôme central, culminant à 55 mètres, fut une prouesse technique de l’époque et influença l’architecture religieuse pendant des siècles. L’intérieur, richement décoré de mosaïques dorées et de marbres colorés, mêle éléments chrétiens et islamiques. Sainte-Sophie symbolise la rencontre des cultures byzantine et ottomane, et reste l’un des monuments les plus emblématiques du patrimoine mondial.
L’architecture byzantine en France
En France, le style byzantin est présent notamment sous des formes néo-byzantines, et, plus discrètement, à travers des influences remontant au Moyen Âge : on trouve plusieurs églises classées au patrimoine français de style byzantin ou romano-byzantin : l'église Notre‑Dame‑de‑Bethléem de Clamecy (Nièvre), l'église Saint‑Étienne de la Cité à Périgueux (Dordogne), l'église Saint‑Spyridon à Cargèse en Corse, l'église du Saint-Esprit à Paris 12ᵉ arrondissement, l'église Saint‑Louis de Vincennes, Notre‑Dame‑de‑Compassion Paris 17ᵉ .
Le néo-byzantinisme des XIXᵉ et XXᵉ siècle, mouvement d’éclectisme architectural, s’empare des codes byzantins, souvent mêlés au roman ou à l’orientalisme chrétien occidental. Il se caractérise par une emphase sur les voûtes plein-cintre, les coupoles, les mosaïques, la brique ou le stuc. La basilique Notre‑Dame‑de‑la‑Garde à Marseille compte parmi les plus grands édifices néo-byzantins français.
Notre‑Dame-de-la-Garde à Marseille, joyau d’architecture romano‑byzantine
Le sanctuaire originel, construit en 1214 par un ermite, fut reconstruit au XVe siècle puis remplacé au XIXe siècle par l’actuelle basilique, afin d’accueillir les nombreux pèlerins, en particulier lors d’épidémies comme le choléra. La construction débute en 1853, à l’initiative de l’évêque de Mazenod, puis suspendue brièvement pour des raisons financières. Elle est reprise sous l’épiscopat de Patrice Cruice et inaugurée le 4 juin 1864. L’édifice sera achevé avec ses mosaïques et ornements architecturaux en 1892.
Œuvre de l’architecte Henry‑Jacques Espérandieu, la basilique est conçue dans un style romano‑byzantin, mélange subtil d’arcs plein cintre romans et des dômes byzantins, typique du renouveau du style au XIXe siècle en France. Extérieurement, elle s’impose par l’alternance de bandes de pierre claire et de calcaire vert (pierre de Calissane), jouant sur les contrastes visuels, typiques de l’esthétique byzantine réinterprétée.
Concernant la décoration intérieure et le symbolisme de la basilique Notre‑Dame-de-la-Garde, l’église supérieure brille grâce à ses mosaïques dorées sur fond or, ses marbres multicolores – blanc, rouge, vert –, et ses motifs géométriques et floraux inspirés du décor byzantin classique. Les scènes représentées incluent des thèmes religieux – Noé, la Table de la Loi, la vigne sacrée – sur des médaillons et voûtes richement décorées. La crypte, creusée dans le roc, contraste radicalement avec l’église haute : sobre, plutôt rustique, elle invite à la contemplation intimiste et abrite un reliquaire de Saint-Ferréol et des statues anciennes. Des ex‑voto marins – maquettes de bateaux, plaques, objets divers – tapissent les murs, témoignant de la ferveur des marins et habitants, et renforçant le caractère communautaire et populaire du lieu.
Notre‑Dame-de-la-Garde est bien plus qu’un monument religieux : c’est une véritable incarnation architecturale du néo‑byzantinisme français, un symbole de foi, de protection et d’identité pour la cité phocéenne. Implantée à environ 157 m d’altitude, la basilique se dresse comme un amer visuel dominant Marseille et la Méditerranée, visible depuis le Vieux-Port, le Panier ou les collines environnantes. Elle représente la mère protectrice, « la Bonne Mère », pour les Marseillais.