Visites privées

Sur l'île de la Cité, le pied-à-terre (très) luxueux d'un collectionneur

À quelques pas du Pont Neuf, un immeuble classé monument historique fait écrin à un appartement de 180 m2 tout juste rénové par le studio AFTER BACH. Pour son deuxième projet résidentiel, le tandem composé de la galeriste Jessica Berguig et de l’architecte et designer Francesco Balzano, a su préserver l'essence historique du lieu tout en créant une atmosphère élégante et moderne.
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Un appartement conçu par le studio AFTER BACH.© Vincent Leroux
Dans une harmonie de vert, d’ocre et d’ivoires, l’entrée donne le ton. Le studio l’a restructurée avec la création d’une alcôve intégrant une banquette. La céramique y est à l’honneur à travers les appliques, la console signée Studio Goons, la lampe à poser Gordon & Martz et le Stool de Floris Wubben, provenant de la galerie JAG. Plafonnier en soie. © Vincent Leroux

Un « lieu exceptionnel » sur l'île de la Cité

Après avoir déployé son talent avenue Montaigne, le studio AFTER BACH signe un nouveau projet résidentiel au cœur de Paris, dans le cadre emblématique de l’île de la Cité. Destiné à un collectionneur, cet appartement de 180 m2 niché dans un immeuble classé monument historique de la place Dauphine (qui n’était plus du tout dans son écriture d’origine) nécessitait une rénovation intégrale. « L'objectif était de créer un équilibre entre minimalisme et historicisme en prolongeant l'atmosphère artistique qui le caractérise. C’est le leitmotiv d’une peinture qu’on a tenté de dessiner pièce par pièce », explique l’architecte Francesco Balzano.

En se baladant dans l’enfilade, le visiteur est saisi par « l’ampleur assez incroyable » de cet appartement. À gauche : dans le coin petit déjeuner, un miroir dédouble l’appartement dans toute sa longueur. Table en céramique Trident de Floris Wubben et un Stool en céramique couleur terre cuite de Floris Wubben. À droite : l’enfilade se poursuit de la cuisine à la librairie et chambre d’invité, en passant par la salle à manger et le salon. © Vincent Leroux
Une lecture historique et moderne des espaces

L’appartement bénéficie d'une double exposition dont le duo a su tirer parti. D’un côté, toute l’enfilade donnant sur la Seine a été structurée avec l’ensemble des pièces de jour : la cuisine, la salle à manger, le salon, un petit bureau façon chambre d'invité, ainsi qu’une salle de bains attenante. Dans la cuisine, le studio a aménagé un espace dédié au petit déjeuner face à la Seine. De l’autre, une partie plus intime – comprenant une chambre et une salle de bains de maître, ainsi qu’un grand dressing – donne sur la place Dauphine. « L'approche du projet consistait à requalifier les espaces en leur redonnant un caractère historique, tout en y apportant une lecture plus minimale dans le dessin. C’est un mélange d’éléments de décor très dessinés et sophistiqués et d’éléments aux lignes plus sobres », précise l’architecte.

Dans la salle à manger, la table vintage de Josef Frank et les chaises vintage de George Nakashima sont issues de la galerie JAG. Couronnée d’appliques en céramique, la cheminée en pierre belge fine accueille un tableau de Camilla Reymann et une sculpture en céramique de Yuko Nishikawa (galerie JAG). Plateau et vase XXS en onyx blanc signés Francesco Balzano.  © Vincent Leroux

Le studio a restructuré les volumes en amenant des éléments de fonctionnalité qui n’existaient pas, notamment dans l’entrée où il a créé une alcôve avec une banquette. Un chauffage a été intégré au sol, de même qu’une climatisation de manière très discrète. « L’idée était de garder un maximum de hauteur dans les parties nobles et de loger toute la technique dans les parties de circulation, derrière des faux-plafonds traités à l’ancienne », dit-il.

Dans ce pied-à-terre ponctué d’arrondis et d’alcôves, le salon a été structuré avec deux petites niches décoratives surplombant une console intégrée. Autour de la table basse de Guy Bareff, une paire de fauteuils de Paolo Buffa (galerie JAG). Une petite lampe en céramique verte de Ruelland, un tableau de Camilla Reymann et des petits objets issus de la galerie JAG, complètent ce décor vintage et arty. Tapis Codimat. © Vincent Leroux 
Un jeu entre sophistication et minimalisme

Dans une atmosphère naturelle et sophistiquée, la palette de verts, alliant le vert-de-gris presque kaki, rappelant la couleur de la Seine, à des verts Véronèse et amande, offre un jeu subtil de nuances au gré de l’ensoleillement et s'accorde harmonieusement aux tons ocre et ivoire des pièces de mobilier. Les corniches ont été traitées avec des jeux de couleurs, plutôt qu’à travers les volumes, tandis que des jeux de miroirs et d'alcôves créent des perspectives démultipliées. Monolithiques et décoratives, les cheminées en pierre belge fine allient une dimension historique, de par le choix de la pierre, à des lignes minimales et sculpturales. À chaque étape du projet Dauphine, AFTER BACH s’est attaché les services d’artisans d’art : peintures signées Atelier Mériguet-Carrère, boiseries laquées par Atelier de la Boiserie, ou encore la marbrerie. « Comme il s’agit d’un bâtiment classé, toutes les menuiseries ont un caractère un peu patrimonial. »

Un habile jeu de miroirs apporte à la cuisine, assez étroite, un sentiment de lumière et d’espace. Le coin petit-déjeuner près de la fenêtre, avec vue sur la Seine. © Vincent Leroux
Les fenêtres comme « des tableaux sur la Seine »

Le tandem a apporté une attention particulière aux détails invisibles tels que la normalisation des passages. Francesco Balzano révèle « tout le travail effectué pour magnifier les espaces grâce à des effets de répétition et harmoniser les passages de portes en simplifiant leurs dimensions. » Toutes les fenêtres côté Seine ont été habillées d’un cache-radiateur en bronze et d’une tablette en pierre, qui signent une présence très forte. Le duo a mis en exergue les encadrements par des volets en bois, un travail minutieux de la corniche et un traitement de la couleur qui s’étend du plafond à la plinthe.

Stupéfiantes perspectives dans le coin petit déjeuner : outre l’enfilade XXL dédoublée par illusion d’optique, une banquette sur mesure en velours beige rosé, agrémentée de coussins en velours (Yarn Edition), ainsi qu’une table en céramique Trident de Floris Wubben et un Stool en céramique terre cuite de Floris Wubben (tous deux issus de la galerie JAG), offrent un cadre propice à un tête-à-tête matinal avec la Seine.  © Vincent Leroux
Un stylisme inspiré des palazzi italiens et des peintures de Balthus

Pour imaginer ce décor associant naturel et raffinement, AFTER BACH s'est inspiré des palazzi italiens et des racines de l’architecte, dont la culture visuelle est empreinte des images de Venise, Florence, Rome et Capri où il passait ses vacances d’été, mais aussi des peintures de Balthus où point une touche d’orientalisme. L'architecture italienne s’y invite à travers des éléments d'impostes et de boiseries. La palette de couleurs et de matières s’inscrit bien dans cet héritage : des enduits à la chaux, des peintures artisanales à l’ancienne, des laques cordées, des grilles en laiton, des quincailleries en bronze… Dans la salle de bains, le traitement de douche – rideaux et grandes tringles – s’inspire de l’univers des grandes maisons de maîtres, telles la Villa Médicis et la Villa Camondo à Paris.

Dans la chambre de maître, des tabourets des années 1950 signés Robsjohn Gibbings (galerie JAG) font office de tables de chevets. Stool Louise recouvert d’un tissu Holland & Sherry et collier en laiton, de Francesco Balzano.  © Vincent Leroux

Côté mobilier, les créations de Francesco Balzano et les pièces provenant de la galerie JAG côtoient des meubles vintage et des œuvres d'art contemporain. Ce pied-à-terre parisien « à l’échelle humaine, intime et doté d’une ampleur assez incroyable » témoigne du talent des deux esthètes pour allier l’épure et la qualité de détail dans des projets de haute facture.

Dans la chambre de maître, un fauteuil en mouton Finn Juhl, une lampe sur pied en céramique bleu de Robsjohn Gibbings, un Stool en céramique de Floris Wubben (l’ensemble, galerie JAG). © Vincent Leroux
Jeu de miroirs dans la penderie attenante à la chambre de maître. © Vincent Leroux
La salle de bains offre un accès privé à Madame et Monsieur – chacun y a sa vasque. Les robinetteries au design intemporel arborent une finition en nickel brillant (gamme Henry, Waterworks). Le miroir, quant à lui, est une pièce d'édition au caractère historique, également de chez Waterworks. Interrupteurs signés Meljac. © Vincent Leroux
Aussi simple que sophistiquée, la salle de bains est entièrement revêtue de pierre belge fine, avec baignoire et vasques massives. Appliques en céramique. Chaise de George Nakashima des années 1950 (galerie JAG). © Vincent Leroux
Au fond de l’appartement, la chambre d’invité et librairie, est aménagée comme un petit cabinet pour se détendre. Daybed en cuir de Jacques Adnet (galerie JAG) et coussins en velours (Holland & Sherry). Tentures en lin naturel et soie de couleur bronze. © Vincent Leroux
Des alcôves ont été dessinées pour accueillir des rangements en pierre belge fine, telles des consoles encastrées dans le mur. Vases en céramique de Rémi Bracquemont (galerie JAG). © Vincent Leroux
Jessica Berguig et Francesco Balzano, du studio AFTER BACH, posent dans la libraire et chambre d’invité, Vases en céramique de Rémi Bracquemont et tableaux de Camilla Reymann, issus de la galerie JAG. © Vincent Leroux